Le Championnat d’Afrique des Nations (CHAN) en cours au Cameroun depuis le 16 janvier se déroule dans un contexte particulier. La crise sanitaire du Coronavirus qui sévit encore plombe le climat des compétitions. Je me suis amusé à scruter les comportements sur l’ambiance dans et autour des stades. Le constat amer est malheureusement le contraste dans l’effectivité des mesures barrières préconisées par la Confédération Africaine de Football (CAF). Observons ensemble quelques images pour apprécier les mesures et les précautions prises en matières de sécurité sanitaire.

Dans le cadre du projet #Coronavirusfacts, dont l’objectif principal est la lutte contre la « désinfodémie » sur le COVID-19 pour éviter, empêcher la propagation de la pandémie due aux Coronavirus, l’Union Européenne et l’Unesco ont initié un certain nombre d’activités orientées sur la sensibilisation. La première compétition officielle de la CAF en pleine pandémie du Coronavirus suscite beaucoup de curiosité. Pour la CAF comme pour le gouvernement camerounais, ce CHAN 2020 représente un défi en pleine pandémie. Surtout que le monde craint une résurgence depuis l’apparition du Nouveau Coronavirus (2019 nCoV). Dans cette crainte, le Cameroun n’est pas en reste.

Cette curiosité est due notamment à la manière dont la CAF va s’organiser pour respecter les mesures de protection. Le CHAN est donc une occasion idoine d’observer les comportements des uns et des autres, de tous les acteurs impliqués dans l’organisation du championnat. Les protocoles Covid-19 dans les stades tels qu’édictés par la FIFA sont-ils respectés ?

En quoi consistent les mesures barrières ?

Le monde entier vit encore des secousses dévastatrices de la crise sanitaire de la Covid-19. Les organisations internationales s’y mettent pour venir à bout de cette pandémie. Les lieux de rassemblement, plus particulièrement en Europe et en Amérique, restent encore fermés au grand public. Les restaurants, les salles de spectacles et de cinéma, les stades et les espaces de jeux sont les plus ciblés. Un exemple parlant, ce 18 janvier 2021, la France innove avec des mesures de précaution en instaurant un couvre-feu dès 18h. C’est l’une des nombreuses mesures prises par la France depuis le déclenchement de cette crise sanitaire.

Cependant, même si l’Afrique reste le continent le moins touché, des mesures de précaution restent toujours et officiellement en vigueur. Mais, le gouvernement camerounais et la CAF ont choisi de déroger à la règle. Celle-ci consiste notamment à éviter toute situation de rassemblement de personnes en un lieu. Cette précaution est importante pour éviter les contacts physiques. C’est ainsi que, initialement prévu en mars 2020, le CHAN se joue finalement ce 16 janvier jusqu’au 7 février 2021. Malgré cette décision prise d’organiser le CHAN, “les mesures sanitaires dans la riposte et la lutte contre la pandémie Covid-19” ont été prises.

A la lecture des deux communiqués rendus public par le Comité d’Organisation de la CAN (Cocan), un constat se dégage. Le gouvernement camerounais a pris des mesures sanitaires de sécurité en respect au protocole Covid-19 établi par la FIFA et la CAF. Il faut toutefois préciser que ces mesures sont en vigueur depuis le Cocan se conforme à un protocole mis en place par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Ce protocole se compose des mesures suivantes à respecter scrupuleusement par le Cocan :

• Pour le taux d’occupation des stades : 25% pour tous les matchs de groupes y compris le match d’ouverture et 50% pour les matchs de demi-finales et finales ;
• Marquage des places assises en fonction de la capacité d’occupation autorisée ;
• Rencontres à guichets fermés ;
• Le port obligatoire des masques par tous et distanciation requise.

Il faut également préciser qu’en plus de ces mesures exigées à monsieur tout le monde, les tests de Covid-19 était exigés à toutes les entrées des stades aux autres. Il ne s’est pas limité aux joueurs et aux encadreurs et officiels de chaque équipe, mais il s’est agi essentiellement des journalistes, photographes, ramasseurs de balles, etc.

Pour avoir été sur le terrain et pour avoir assisté aux matchs particulièrement dans la ville de Douala et Yaoundé, j’ai pu observer l’application scrupuleuse de ces mesures. Je vous livre ici quelques clichés pour illustration.

L’avant-match : exigés à l’entrée, les masques sont visibles

Comme le préconise le protocole rendu public le 3 janvier par le Cocan sur les mesures à prendre durant le CHAN, la sécurité commence d’abord à l’extérieur. Il est exigé aux spectateurs, non pas seulement un ticket en cours de validité pour le match programmé, mais surtout un masque. C’est ce qu’on peut observer sur ces images de l’entrée du stade de la Réunification de Bépanda à Douala :

A l’observation, ces images montrent bel et bien des spectateurs en rang pour l’accès au stade de la Réunification de Bépanda à Douala. Tous les spectateurs ont chacun un masque. On peut l’affirmer même si tout le monde n’a pas de masque. On peut le présumer puisqu’il leur sera a priori interdit d’accéder au stade. Malheureusement, quelques-uns ont le masque qui laisse penser que les mesures sécuritaires de protection contre la Covid-19 sont respectées.

La distanciation dans les rangs n’est pas respectée non plus. Ce qui laisse penser, avec forte évidence, qu’il n’existe pas de marquages au sol. La distanciation ne peut être respectée dans les rangs qu’à travers des marques au sol qui vont symboliser l’écart entre une personne et son voisin de devant et de derrière. Ces images sont semblables pour tous les trois autres stades réquisitionnés pour la compétition.

Pendant les matchs : les masques ne sont visibles que dans les tribunes officielles

Les images qui présentent l’ambiance dans les tribunes des stades de Nfandena à Yaoundé et de Japoma à Douala sont contrastées. Les tribunes d’honneur et les tribune grand public ne présentent pas les mêmes configurations dans le respect des mesures de sécurité sanitaire.

En jetant un coup d’œil sur les tribunes grand public des deux stades, on se rend bien évidemment compte de deux choses. La première est que le port du masque n’est plus d’actualité. Cela ne signifie pas que les spectateurs n’en ont pas, puisqu’il leur est exigé à l’entrée du stade. Le problème peut certainement se trouver au niveau de la commodité de ce masque en pareilles circonstances. Les tribunes ouvertes au grand public communément appelées “tribunes des pauvres” se caractérisent par leurs coûts plus bas. Elles sont donc accessibles à monsieur tout le monde où l’ambiance est féérique.

La question qu’on pourrait se poser est celle de savoir comment porter un masque dans les situations d’ambiance. Le port d’un masque rendrait certainement complexe la respiration, sans oublier la forte température qui règne au Cameroun en pareille saison sèche. La température, à certains endroits pouvant aller au-delà de 35°C à l’ombre. Curieusement, lors de la cérémonie d’ouverture le 16 janvier dernier, les danseuses et les danseurs avaient leurs masques en exécutant leur parade.

Groupes de danse et de musique du terroir lors de la cérémonie d’ouverture du CHAN à Yaoundé. Tous les danseurs et les musiciens ont bel et bien leur masque. Crédit photo : Cocan

La dernière observation à faire concernant le respect des mesures barrières, c’est le marquage des sièges. Il est question, pour le Cocan, de mettre des signes sur des sièges qui ne doivent pas être occupés. Malheureusement, l’occupation des places assises dans les tribunes de grand public n’est toujours pas comprise.

La deuxième chose à relever ici est le respect de ces mesures dans les tribunes officielles appelées communément “tribunes d’honneur”. Ces tribunes ont la particularité d’être plus luxueuses. Elles comportent des places réservées aux délégations officielles des pays participants d’une part. D’autre part, aux personnalités du pays et de la ville. Sans toutefois oublier qu’il existe également une tribune présentant les mêmes luxes et réservée évidemment aux personnes plus nanties.

Les tribunes d’honneur sont réputées pour être les plus convoitées et les plus en vue. La moindre dérive pourrait être fatale. Il s’agit d’éviter toute mauvaise interprétation d’un non-respect de l’une des mesures sanitaires de sécurité dans la lutte contre la Covid-19. Par contre, la distanciation (respect de la distance, de l’écart entre deux personnes) n’est malheureusement pas observée. La tribune d’honneur est celle où se trouvent les personnalités politiques et officielles camerounaises, de la FIFA, de la CAF et de la Fédération Camerounaise de Football.

Bien que le port de masque soit respecté, la tribune d’honneur fait l’exception dans le non-respect des mesures de distanciation. A l’observation, cette disposition pour la tribune d’honneur est un choix volontaire du Cocan. Même cette mesure exceptionnelle peut être justifiée, peut-on comprendre les motivations des organisateurs ? Si les autres peuvent être considérés comme des indisciplinés, comment peut-on justifier le choix des organisateurs concernant la tribune d’honneur ? Il serait toutefois intéressant d’avoir l’avis de l’OMS.

Après les matchs : les masques résistent toujours malgré tout

Ce n’est qu’un constat d’évidence sur le relâchement de ces mesures après le match d’ouverture du 16 janvier dernier. Comme le montre cette image prise dans les vestiaires, la délégation du ministre du sport et de l’éducation rencontre les joueurs Lions Indomptables. C’est à la suite de leur victoire face au Zimbabwe (1-0). Les membres de la délégation, y compris le ministre lui-même, sont masqués. Évidemment, les joueurs ne le sont pas, puisqu’ils sont en retranchement dans leur intimité.

Le bilan sur le respect des mesures sanitaires de sécurité contre la pandémie Covid-19 est mitigé. Le relâchement observé depuis la fin du semi-confinement au mois de mai suscite de plus en plus d’interrogations. Le continent africain s’illustre particulièrement par un faible taux de contamination au Coronavirus selon les chiffres de l’OMS. Ne faut-il pas comprendre ce relâchement par le fait que l’Afrique résisterait plus à cette Covid-19 ? Il est également important de noter certains policiers et gendarmes assurant la sécurité des stades ne sont pas masqués. Curieux quand même, non ?

Tchakounte Kemayou